Huitième partie : Laos, de la frontière thaïlandaise à la frontière vietnamienne, du 11 septembre au 10 octobre 2010 De la frontière laotienne à Luang Namtha, du 11 au 27 septembre : Pour passer au Laos, rien de plus simple, il faut juste traverser le Mekong. Celui-ci est bien plus gros que lorsque nous l'avions quitté, et pourtant nous sommes bien plus en amont. La mousson s'est chargée de le gonfler à bloc, pour le plus grand bonheur des agriculteurs et des pêcheurs. Et elle n'a pas fini de nous envoyer tantôt ses trombes d'eau, tantôt un gentil crachin breton. En un coup de pirogue nous voilà de retour au Laos. Les formalités douanières nous semblent à présent plutôt banales, presque décevantes. On n'essaie même pas de nous extorquer un bakchich... bon, tant pis. On décide de passer la journée du lendemain à Houay Xay, première ville laotienne. On retrouve la fameuse "Beer Lao" qui évoquera quelques souvenirs à Seb et Nico.... (spéciale dédicace). Pour ce qui est de l'itinéraire, il y a bien une belle route nationale qui nous tend les bras pour nous mener à Luang Namtha puis Muang Sing. Mais cet itinéraire nous oblige à faire un aller-retour sur Muang Sing et ça, ça n'est pas notre tasse de thé ; on préfère les boucles.... Donc plusieurs possibilités s'offrent à nous. Plan A, on fait les 30 premiers kilomètres sur la nationale, puis on bifurque plein nord sur 80 km de piste, vraisemblablement difficile compte tenu de la saison. On enchaîne sur 15 km de bateau et on finit sur 70 km de route. Plan B, on fait plus de kilomètres sur la nationale mais par contre il nous faut emprunter une piste plutôt super montagneuse et incertaine avant de rejoindre une route digne de ce nom. On opte pour le plan A, et les Steiner laissent partir les Clabaut une journée en avance. Finalement, on se retrouve le soir-même à... Houay Xay ! En effet, après avoir avalé les 30 km de nationale, les Clabaut se sont heurté à la gadoue de la piste, qui ressemble à de vraies montagnes russes. Après moultes réflexions et tentatives de joindre les Steiner par téléphone (qui naviguaient alors entre le sauna et le massage de la Croix-rouge...), les Clabaut ont décidé d'opter pour un plan C (le fameux....). Donc, retour au bercail et brainstorming tous ensemble. Et si la solution était de longer le Mekong jusqu'au bout de la route c'est-à-dire Ban Tanpheung (55 km), de sauter dans un bateau jusqu'à Xieng Kok, et de s'enquiller les 70 km jusqu'à Muang Sing ? ( "Why not ?", comme dirait Estelle D.) Il y a une légère incertitude sur le fait de trouver un bateau au bout de la route, mais impossible n'est pas patatesdoucesque. Le lendemain, une belle étape de vélo le long du Mekong fait notre bonheur : soleil et chaleur au rendez-vous, végétation luxuriante et ballet de papillons. NDR : explication du photo-montage dans le coin privé. Paumé au bout de la route, ce n'est pas un village comme les autres qui nous attend, c'est plutôt une sorte de Las Vegas du Far East : un casino clinquant, des limousines, des restaurants, des hôtels et des boulevards démesurés, le tout au milieu de nulle part. Tout est surréaliste et pourtant les ouvriers qui triment d'arrache-pied du matin au soir pour faire sortir de terre ce Disneyland pour adultes, sont eux bien réels. On passe devant leur bidonville, dans lequel femmes et enfants vivent dans des conditions bien précaires, le temps du chantier. A quoi rime cette mascarade ? Qui finance ? D'où vient la clientèle ? Bien des questions sans réponse... Nos verres se remplissent aussi vite que nous les vidons et pourtant, nos hôtes nous invitent à les boire cul-sec pour, soit-disant, chasser les mauvais esprits de la maison. Ah ben s'il faut jouer les ghostbusters, ils ont trouvé leurs hommes. On entame alors une sorte de joute musicale : chansons françaises et laotiennes s'alternent, de plus en plus criardes et paillardes à mesure que la soirée avance. De leur côté, chaque petite patate s'est trouvée un ange-gardien de quelques années son aîné. Ce ne sont donc pas elles qui réclameront pour aller se coucher. Le lendemain à 8h, Jean-Gui et moi sommes sur le pied-de-guerre (la bouche pâteuse certes...) pour chercher une quelconque embarcation qui nous mènera à Xieng Kok, puisqu'aucune piste n'est effectivement praticable à vélo en cette saison. Débute alors un vrai jeu de piste... On suit les bras qui se tendent pour nous indiquer le port ; tantôt à droite à 300 mètres, tantôt à gauche à 2 km.... Plutôt comique, on croit qu'on brûle et la minute d'après on est de nouveau froid. A 2,5 km de la guest-house, on finit par tomber sur l'association des bateliers, rien que ça, juste à côté du bureau de l'immigration. Après avoir usé plusieurs interlocuteurs, on finit pas apprendre qu'un bateau passe à 10h. Encore quelques palabres et il est déjà 9h15, il n'y a donc plus une minute à perdre si on veut faire partie des passagers. On fonce réveiller le reste des troupes avec le tact qui caractérise le mec encore légèrement alcoolisé et en pleine panique, c'est-à-dire.... sans aucun tact ! Alors que l'on fait de notre mieux pour plier les gaules en un temps record, le gars du port vient nous mettre une pression amicale. Mmmmmh, c'est bon ça la pression.... On se retourne vers le patron de la guest-house qui nous avoue que pour aujourd'hui, c'est effectivement foutu. Les récents orages auraient provoqué quelques perturbations dans le trafic fluvial. Il nous assure néanmoins que pour demain 9h, nous aurons un bateau. Allez, ça fait partie du voyage que de ne pas avoir d'assurance sur les horaires, pas plus que sur les prix. On investit donc nos chambres pour la sieste des patatounes. Et puis on n'est pas si mal dans notre nouvelle "maison", comme disent nos enfants, avec une salle de restaurant spacieuse surplombant le Mekong. Fabrication de chips de banane, à la guest-house Côté cour, la cerise sur le gâteau : un boulodrome et, qui plus est, animé depuis le début de l'après-midi. On ne sait pas bien qui fait partie des lieux, qui sont les clients mais quoi qu'il en soit, tout ce petit monde enchaîne les parties de pétanque ainsi que les verres de bière. Nous n'avons d'ailleurs qu'un pas à faire pour se retrouver avec un verre à la main et être inscrit pour la prochaine partie. Accueillir un étranger, le mettre à l'aise, voilà ce qui semble inné pour un laotien. Cela paraît si simple et pourtant, le faisons-nous avec autant de spontanéité ? Un bon moment de convivialité autour de ce boulodrome qui nous rappelle un peu la maison. Je ne m'étale pas sur la raclée que l'on s'est pris....De toutes façons, on a plein de bonnes excuses à la française : on ne connaît pas le terrain, on n'était pas échauffé, ça fait longtemps qu'on a pas joué et c'était pas nos boules.... Le lendemain, c'est le jour du départ...... peut-être. A 8h30, le patron, qui d'ailleurs parle quelques mots de français, vient nous prévenir que le bateau accostera dans 30 minutes au pied de la guest-house. Parfait, ça confirme les infos de la veille. On commande les riz-omelette du petit dèj' et on descend les vélos sur la berge. 9h30, 10h, toujours pas de bateau. Ah, il faut être philosophe dans ces moments. Une chose est sûre, c'est qu'il est temps de s'envoyer le petit dèj'.... Pourtant, depuis notre poste de guet, on a bien vu passer des bateaux, mais on nous fait comprendre que ça n'était pas les bons. Vers 11h, on apprend qu'en réalité, les trois bateaux qui nous sont passés devant le nez n'étaient pas assez rapides pour nous.... Jean-Gui fulmine : "mais on s'en fout, ce qu'on veut c'est aller à Xieng Kok !!!!" Ca n'est pas faux..... Et si c'était un stratagème pour nous garder avec eux et nous louer des chambres pendant une semaine ? Allons, faut pas sombrer dans la paranoïa tout de même. 12h15, la femme du patron arrive en courant : "vous voyez le bateau là-bas ? Ben c'est le vôtre !". Youpi, c'est la fête, les enfants sautent partout. Il faut dire qu'ils commençaient à ne plus vraiment y croire à ce petit tour de bateau. Le bateau est enfin arrivé !!! A partir de là, tout va très vite ; un quart d'heure plus tard nous sommes tous dans le bateau et on agite nos bras pour remercier chaleureusement cette véritable famille d'accueil, qui aura vécu avec nous cette longue attente à rebondissements. Ca y est, nous naviguons enfin sur le Mekong (une première) sur un magnifique bateau de frêt en bois, d'au moins 20 mètres de long. L'intérieur est occupé à 90% par des marchandises, entièrement recouvertes par des couvertures et des bâches (voire deux ba-bâches pour les ch'tis). L'équipage semble être familial. On nous installe sur une natte, juste derrière le poste de pilotage, sur une plateforme qui nous permet d'apprécier pleinement le décor magnifique au cours de cette mini-croisière.
Sur l'eau, on croise d'autres bateaux de frêt, des navires chinois, quelques pirogues ainsi que des petits offshore dont les pilotes sont casqués. Sur les rives, c'est sauvage au possible et tout en relief ; la nature explose de vie. Quelques villages et cultures viennent trouer cette immensité verte. En rive gauche, c'est le Myanmar (anciennement Birmanie), plutôt attirant mais ce ne sera pas pour cette fois. La nuit finit par tomber, la pluie aussi. On arrive à Xieng Kok vers 19h dans une ambiance "bout du monde". Le lendemain, les Steiner enfourchent leurs montures, tandis que les Clabaut, tombés sous le charme du village, décident d'y passer la journée. A moins que ce ne soit pour la vue depuis leur bungalow... C'est l'occasion de faire route séparée, se retrouver en famille, vivre des rencontres et des expériences chacun de son côté. Comme dans un vieux couple, on a besoin d'air et ça fait du bien de se l'accorder ; allez, on se retrouve dans 3 jours à Muang Sing. La route est une des plus belles que l'on aura parcouru. Elle suit un cours d'eau que l'on remonte et qui nous offrira quelques bonnes baignades. Les montagnes de part et d'autre, ainsi que les rizières à perte de vue nous remettent à notre place. Perdus au milieu de cette nature, nous voilà semblable à des fourmis, avec l'impression d'avancer doucement sur cette piste. On est loin de nos honorables moyennes sur les belles routes thaïlandaises mais le décor et les villages que l'on traverse nous invitent à la flânerie. Nous sommes sous un charme retrouvé. Non pas que la Thaïlande soit moins belle mais cette nature laotienne, les maisons en bambou et les toits en chaume sont décidément envoûtants. Le ciel nous subjugue également. Au même instant, on peut avoir du bleu cyan à gauche, des beaux cumulos blancs comme neige à droite et derrière nous une déferlante des nuages noirs, chargés et menaçants. Nous scrutons régulièrement ce ballet aérien pour savoir à quoi nous attendre. Suspense. Silence. Un éclair, puis un grondement sourd, l'orage approche. Nous sommes sous un caniard, n'osant pas nous arrêter ailleurs qu'à l'ombre de la moindre branche de peur que le thermomètre ne grimpe à l'intérieur des carrioles, et pourtant, dans moins d'un quart d'heure, nous serons sous une pluie battante. C'est une certitude, le coup de vent précédant chaque pluie tropicale nous rafraîchit déjà. Les premières gouttes se font sentir mais il est encore trop tôt pour baisser la capote de la carriole... C'est un exercice délicat : trop tôt, l'habitacle se transforme en sauna, mais si l'on tarde, les enfants vous mènent la vie dure car la pluie... ça mouille. Ca y est, on est pile sous le grain, les enfants sont à l'abri et nous sous la douche salvatrice... Un pur moment de plaisir que j'affectionne particulièrement. C'est une renaissance que de se faire laver de sa sueur tout en continuant à pédaler. L'eau de pluie semble même plus douce que les autres. Elle est à la bonne température à ces latitudes, rafraîchissante mais pas caillante. J'en profite souvent pour dépoussièrer mon fidèle destrier, avec ce sentiment ridicule que lui aussi apprécie de se faire laver par de délicates caresses. Mais ce pur moment de sensualité n'est jamais très long. Quelqu'un coupe toujours le robinet trop vite et nous replonge ainsi dans une espèce de moiteur qui grandit à mesure que l'horizon se dégage à nouveau. Il ne faut alors pas tarder à décapoter, toujours pour les mêmes raisons. Une ambiance chaude et humide succède à ces pluies passagères (ndr : Manu, je t'interdis de déformer mes paroles de poète). Mais sans elles, le vert ne serait pas aussi vert, et les rivières ne seraient pas aussi vivantes. Le long de cette piste, nous croisons également une population qui ne nous semble pas toujours rayonnante de santé. Un certain nombre souffre de conjonctivite et de migraine et pour en avoir tous eu, on a vraiment mal pour eux. Mais il ne faut pas se leurrer, on a beau trouver ses villages magnifiques, ce n'est de loin pas le paradis sur terre. Ces gens nous semblent vulnérables face à tous les maux dont ils peuvent souffrir. Dans leur culture, les maux viendraient d'esprits malfaisants que chaque malade doit combattre lui-même. Ce n'est donc pas naturel pour eux d'aller à l'hôpital, malheureusement. Ici encore, la dengue tue par ignorance des symptômes et des risques.
Les femmes des ethnies du nord du Laos portent la coiffe traditionnelle :
Nous nous retrouvons tous à Muang Sing le 19 septembre, dans une magnifique demeure, à l'entrée de la ville et en bordure de rizière. A une trentaine de mètres se trouve le restaurant-sauna-massage, structure entièrement en bambou, qui deviendra très vite notre deuxième maison. Les raisons : des proprios adorables tout comme leurs enfants, un sauna aux herbes bien roots mais redoutablement relaxant, et des frites maisons (qu'on nous pardonne ce péché mignon d'européen) absolument divines. Dans la plaine de Muang Sing : notre resto-sauna au petit matin, et le Wat, ou pagode Le lendemain de notre arrivée, en dehors d'une balade-baignade dans un village aux alentours, nous préparons activement l'anniversaire de Jeanne. Pas toujours facile de trouver ce que l'on cherche mais au final, nous avons réussi à louer à droite et à gauche des vélos et autres objets roulants pour toutes les patatounes, et de quoi confectionner les déguisements et le gâteau pour le goûter. Le 21 septembre, Jeanne souffle ses 4 bougies, entourée de ses trois compagnons d'aventure et de quelques enfants du quartier. C'est l'occasion d'assouvir leur profond désir de pédaler eux aussi, jusqu'à n'en plus pouvoir, à l'ombre du vieux marché entièrement vide.
Le lendemain, nous aurions bien quitté la ville dès le matin pour élire domicile dans un village voisin si nous n'avions pas été à court de liquidité. La ville étant dépourvue de distributeur de billets, il a fallu passer par un organisme international de transfert de fonds. L'histoire a été une nouvelle épreuve de patience puisqu'il a fallu batailler de 10h à 16h, entre la banque, l'office du tourisme, le cyber café et le téléphone avant d'obtenir le moindre billet. Ce problème étant réglé, j'ai dû faire face à un autre, tout aussi nerveusement éreintant... Ban Namdet Mai et sa balançoire traditionnelle, que l'on trouve dans tous les villages des tribus Akha Après plusieurs tentatives désespérées auprès de loueurs de VTT locaux, je ne vois plus qu'une seule solution : me rendre en bus demain à Luang Namtha pour trouver le fameux roulement. Nous réinvestissons donc notre chambre. Ce soir là, nous faisons la connaissance d'un jeune couple, Zoé et Hyppolite, qui aurait pu être nous il y a quelques années. On dîne ensemble et on se fait une tournante de sauna car les enfants ne sont toujours pas couchés. Jeanne finit par s'endormir sur les lits dédiés aux massages. L'heure avançant, il nous faut quitter les lieux car le sauna ferme. Je remonte Joseph dans mes bras et Chantal prend les affaires. Nous laissons donc Jeanne le temps d'un aller-retour à la guest-house voisine. Lorsque je redescends pour la chercher, elle n'est plus là.... Tout est éteint....une nouvelle partie de cache-cache ? Je l'appelle en sourdine. La maîtresse de maison sort de sa chambre et me fait signe que Jeanne dort avec eux dans leur lit !!!! Mais qu'est-ce qu'il leur est passé par la tête ? Ont-ils vraiment cru qu'on pouvait laisser notre fille dormir seule ou avaient-ils envie de dormir avec elle au point de nous la subtiliser pour la nuit ? Découvrir des nouveaux raisonnements si loin des nôtres, cela fait partie du voyage... Le lendemain, je prends le premier bus pour Luang Namtha. A peine arrivé, je commence mon enquête à rebondissements. Le premier garagiste que je questionne me renvoit vers les magasins proches du marché. Sur la route, un gars m'interpelle en anglais et me demande ce que je cherche. Après lui avoir exposé l'objet de ma quête, il me dit qu'il a ça en stock.... avant de se raviser. Il m'assure néanmoins qu'il peut me trouver ces roulements. Je préfère chercher par moi-même dans un premier temps, mais après avoir démarché une demi-douzaine de quincailleries magnifiquement achalandées, sans succès, je me retourne vers ce personnage si sûr de lui. Il me demande de m'installer confortablement devant son magasin tandis qu'il part à son tour en quête de cette pièce, en scooter. Il revient un quart d'heure plus tard, broucouille... Aïe, ça se complique. Je décide de démarcher les loueurs de VTT. Après en avoir vu plusieurs, dont un qui me conseille tout bêtement d'aller à Ventiane ( 24h de bus !), je tombe sur un jeune, qui me conduit à son garagiste en scooter. Bingo ! ll a le moyeu complet, les affaires reprennent. J'ai juste le temps de choper le bus qui me ramène au bercail. On rejoint le soir-même les Clabaut qui nous ont dégoté une magnifique école dans un village de l'ethnie des Akha, bien typique. Les moyens et les effectifs sont sans commune mesure avec la dernière école visitée (en Thaïlande) et les enfants méritent d'autant plus cette modeste ouverture sur le monde que nous leur proposons. L'instituteur est incapable de traduire tout ce qu'on leur baraguine en anglais, mais les images et les mîmes sont suffisament évoquants. Le spectacle de Monsieur Patate et de Monsieur Douce provoque des effets euphorisants et déchaîne les foules lorsque les bonbons sortent du sac magique de Monsieur Douce. Il s'en est fallu de peu pour que la scène ne tourne pas à l'émeute tant les bonbons ont été arrachés de nos mains, sous le regard placide de l'instituteur. C'est sûr, ces enfants ne manquent pas d'énergie.
Après cette matinée scolaire, nos passons une après-midi tranquillou, entre sieste, promenade, lecture et écriture du présent carnet de voyage. Depuis notre entrée au Laos, nous avons adopté une léger changement de rythme. En effet, le kilomètrage pour cette partie est moins élevé, les paysages sont grandioses et nous avons déjà rempli notre contrat kilométrique, alors pourquoi ne pas profiter un peu plus des enfants, des endroits où l'on se sent bien, et laisser couler sans scrupule les matinées trop pluvieuses. Le lendemain, après un petit crochet boueux à souhait rien que pour le plaisir, on retourne sur Muang Sing pour y faire une halte gustative au marché. Puis on pousse jusqu'à un lodge surplombant les rizières et situé au départ de la piste pour la cascade de Nam Keo. Une étape d'au moins ... 15 km sans scrupule (désolé si on en déçoit certains). Du coup, on a le temps de monter, non pas à la cascade qui est bien trop loin, mais au Wat That Xieng Tung, le plus important temple de Muang Sing, dont le stupa abrite la pomme d'Adam de Bouddha, d'après ce que nous dit l'un des deux moines qui l'habite. Nous conversons avec ce dernier qui suprend les enfants en leur chantant "Frère Jacques" en français, en laotien et même en chinois. Vue depuis le lodge Prière au Wat That Xieng Tung 55 km de montagne nous séparent de Luang Namtha. Depuis le bus, j'avais repéré un village à mi-chemin alors pourquoi ne pas continuer sur notre rythme pépère ? C'est tranché, on les fait en deux jours. En plus, la route est toujours aussi ennivrante : les papillons sont tous plus beaux les uns que les autres et les bruits de la forêt continuent de nous intriguer. Petit aparté : au Laos, les insectes font partie du quotidien. Tantôt on les retrouve dans nos assiettes (grillés pour l'apéro et les larves en guise de viande accompagnant riz et légumes), tantôt ils servent de jouets aux enfants... Comment ? C'est très simple, on leur passe une aiguille et du fil à travers l'abdomen et on obtient un superbe hélicoptère qu'on allume en le secouant (pour ceux qui volent bien sûr). Ca vous choque ? Allez, qui n'a jamais arraché les pattes d'une sauterelle durant son enfance ? C'est sûr, ils ont une durée de vie limitée ces jouets mais au moins ils ne balancent pas des piles usagées dans la nature (puisqu'ils les mangent.... bon d'accord j'arrête mon cynisme... mais c'est ma partie, j'écris ce que je veux d'abord !). La forêt bordant la route, et l'une de ses habitantes... Une pause de midi au bord de la rivière, l'occasion de se rafraîchir et de rencontrer une personne originaire du village dans lequel nous souhaitons passer la nuit : Lakam May. Il nous dit qu'on pourrait y dormir dans l'école, dont l'institutrice est une amie et s'appelle Noy. Parfait, on est dimanche, l'école sera vide jusqu'au lendemain 8h. 14 km plus tard, on se gare devant l'école et demandons l'hospitalité à l'institutrice. Mais elle ne s'appelle pas Noy et nous dirige vers la maison du chef, situé au centre du village, de l'autre côté du cours d'eau. C'est sûr rien n'est jamais acquis et tout est un jeu de piste mais nous sommes sous bonne escorte. Une ribambelle d'enfants nous accompagne jusqu'à la seule maison avec un toit en dur et en moins de deux les négociations pour le gîte et le couvert sont closes. Tout le monde est satisfait, on peut continuer sereinement à servir d'attraction à ce village Akha jusqu'au dîner, enfin jusqu'au coucher même, puisque quiconque va et vient comme bon lui semble, dans cette maison comme dans toutes les autres semble-t-il. Vue depuis la maison de notre hôte. Notez les toits noircis par la fumée des cuisines. Les villageois sont intrigués autant par nos montures que par nous-mêmes, et ils ne peuvent s'empêcher de toucher à tout (je parle des vélos bien sûr) même ce qu'on ne voudrait pas. Mais difficile de freiner cette curiosité. Une fois repus, nous rejoignons la bonne cinquantaine de villageois qui se trouvent scotchés devant la TV, dans la pièce qui devrait être notre chambre. Parmi eux, il y a beaucoup de jeunes mais aussi des mamans qui allaitent, des vieux qui crachent à travers les trous du plancher, des ados qui tentent désespérément de nous refourguer de l'opium. Bref, un hôtel tout à fait banal, non ? Et pourtant, on prend un certain plaisir à se regarder mutuellement du coin de l'oeil, avec une légère retenue. Nos patatounes amusent encore un peu la galerie ou bien regardent la TV comme tout le monde. Ca dure un moment puis elles commencent à avoir leur compte. Allez, brossage de dents, ça fait rire une bonne moitié du public mais au moins notre hôte comprend que malgré nos efforts pour veiller, on irait bien se coucher. Un évènement contrariant vient perturber la soirée : Jean-Gui se rend compte que quelqu'un a volé la lampe frontale et quelques sous qui se trouvaient dans une sacoche de selle. Notre différence de niveaux de vie ne leur donne certes pas le droit de nous voler mais personne n'y peut rien, pas même le maître de maison que nous informons de l'incident. Même dans une société aussi respectueuse que celle du Laos, il y a quelques gens malintentionnés. La chambre privative Le petit déjeuner Au (très) petit matin, le néon s'allume à 4h45 dans la chambre commune... Wouahouuuu, on ne peut pas dire que ce soient des lève-tard.... Par chance, ils nous laissent faire une grasse matinée jusqu'à 7h30 (...) alors que eux ont déjà gagné leur journée à faire on ne sait quoi tandis qu'il fait encore nuit noire. On les soupçonne d'être allés au champ car à peine nous avions fini notre petit déj' que la maîtresse de maison nous a fait ses aurevoirs pour se rendre en bus au marché de Muang Sing avec deux gros sacs. Sur la route, on croise la pesée et le chargement du caoutchouc. Arrivée tout en douceur à Luang Namtha. Je fais ma troménie auprès des personnes qui m'avaient aidé dans ma quête divine du roulement de pédalier, pour les remercier à nouveau. Parmi eux, les guides de "Green discovery", une agence de trekking, sont aussi ravis que moi de nous revoir. On parle de notre voyage à vélo et ils me proposent un trek. Je décline en disant que nos enfants sont un peu jeunes et que l'on reviendra dans 5 ans. Ils me répondent navrés que, d'ici là, toute la forêt primaire aura été décimée pour faire place aux plantations d'arbres à caoutchouc.... Soupir...
Jacques
------------------------------- De Luang Namtha à la frontière vietnamienne, du 27 septembre au 10 octobre 2010 : La troménie de Jacques nous permet de découvrir la perle des hébergements de Luang Namtha, enfin selon nos critères familiaux : la "Zuela Guest-House". Une superbe maison en bois, au calme, au milieu d'un grand jardin, avec des jeux pour les enfants (et notamment une trottinette qui n'aura aucun répis au cours de notre séjour), à proximité des marchés et avec Internet (pour la mise en ligne du site ! ). Bref, nous nous y sentons si bien que nous poursuivons notre rythme pépère laotien et nous octroyons une nouvelle pause de quelques jours. Un lieu familial où nous sommes comme à la maison. Cette halte sera encore l'occasion de régaler nos papilles, entre autres au "night-market", où il faut déambuler de stand en stand pour trouver son bonheur, et quoi de meilleur que des patates douces ! Ce sera donc une orgie de patates douces pour les Patates Douces ... mais nous prendrons aussi des repas gargantuesques dans un restaurant indien qui nous a donné bien envie d'aller sur place vérifier si la nourriture y est aussi bonne : l'Inde, prochaine destination ? Non, on laisse un peu grandir les enfants, histoire de commencer à les habituer à manger pimenté ! Une fois encore, le hasard du calendrier veut que notre séjour coïncide avec un grand évènement chez nos hôtes. Cette fois-ci, c'est l'anniversaire des deux enfants de la maison : 8 ans pour Zuela la fille, et 4 ans pour le fils, anniversaire auquel nous sommes tous conviés. C'est un grand honneur lorsque nous réalisons que nous sommes les seuls convives occidentaux de l'assemblée. Nous goûtons donc au plaisir de partager un nouvel anniversaire laotien ! Une guirlande de ballons, une avalanche de cadeaux, des verres bus cul-sec pour chasser les mauvais esprits de la maison (ah ben si c'est pour la bonne cause en plus) ... un anniversaire sans doute bien différent de celui d'un enfant de l'un des petits villages que nous en avons croisé dernièrement, mais il faut bien l'avouer, nous avons passé une excellente soirée. La soirée fût si bonne, et arrosée, que nous avions conclu avant même de nous coucher qu'un départ à 9 heures tel qu'initialement prévu ne serait pas réaliste, ni même raisonnable ! C'est donc après le repas de midi (allez on peut même dire à 15 heures passées), que nous prenons la route, direction Oudomxai que nous prévoyons d'atteindre le surlendemain. Nous ouvrons bien grands nos yeux pour ce nouveau diaporama qui défile : "y'a pas à dire, c'est vraiment superbe !". L'un des "villages à maïs" que nous traversons
Ils nous mettent ensuite en garde sur l'état de la route que nous devons emprunter. Séb et Nico, les copains venus nous rejoindre pour pédaler à nos côtés en mars dernier, nous avaient déjà informé que la route était en travaux et que ça grimpait : on confirme pour les travaux et la poussière. En revanche, pour ce qui de la montée, on verra plus tard car nous nous arrêtons bien avant d'attaquer le col.
Le lendemain, nous alternons des parties de route gourdronnée et de piste, mais la beauté des paysages environnants reste la même. Sur les conseils avisés de Benoît et Albane (cyclo-touristes français rencontrés à Luang Prabang lors de notre premier passage au Laos), nous nous arrêtons au pied du col à gravir que nous nous réservons pour le lendemain et filons nous baigner à la rivière. Les 20 km de montée, qui me paraissaient une véritable montagne sur le profil, se font sans problème, commencerions-nous à avoir un bon entrainement ? Arrivés en haut du col pour le repas de midi, nous cherchons en vain un restaurant qui, au final, s'improvisera dans l'une des familles du premier village après la montée. Moyennant finances, nous partageons le reste de leur riz gluant agrémenté d'une omelette et de légumes : un délice dont nous ne nous lassons pas. Les enfants au coin du feu pendant la cuisson de l'omelette Quelques kilomètres avant Oudomxai, nous croisons un panneau indiquant des sources d'eau chaude, il est encore assez tôt et il ne reste qu'une demi-douzaine de kilomètres avant d'atteindre la ville, alors banco ! On se l'imagine bien la petite heure de farniente dans l'eau chaude, les enfants pataugeant pendant que nous relaxons nos muscles qui ont tout de même été bien sollicités. Nous avons pour guide toute une ribambelle d'enfants et traversons une rizière sur un sentier étroit qui vaudra plusieurs belles gamelles à nos enfants. Ils ont en effet bien du mal à marcher en mettant un pied devant l'autre tel un funambule, contrairement aux autres enfants pour qui c'est naturel. Les spectaculaires sources d'eau chaude ...
Caroline
A Oudomxai les Patates se font pétrir et cuire à l'étuvée ... Et oui, au Laos dans chaque ville la Croix Rouge propose massages et sauna traditionnel aux herbes. Pendant que les parents éliminent leurs toxines dans le sauna, les petites pen'tières se font masser, et elles aiment ça ! Une pen'tière en plein massage : Nous reprenons ensuite notre route plein nord en direction de Muang Khoua où nous étions déjà passés au mois de mars, le jour de l'anniversaire de Chantal exactement. Nos lecteurs assidus se souviennent peut-être : la piste en travaux pour venir du Vietnam, la poussière, la journée de la femme à l'occasion de laquelle les nôtres transpiraient à grosses gouttes ... Et bien au final il y avait le village de Muang Khoua. Cela veut donc dire que nous sommes à quelques kilomètres de la fin de notre boucle à vélo, à 8. Nous les parcourons la gorge serrée à l'idée que ce périple touche à sa fin, mais très heureux de ce que nous avons fait. Entre les images des paysages que nous traversons se glissent alors celles de notre voyage, dont le début fait maintenant partie des souvenirs que notre mémoire n'est pas prête d'oublier. A 28 km d'Oudomxai, nous faisons halte à Muang La où nous savourons à nouveau des sources chaudes sulfurées dont certaines résurgences sortent directement dans la rivière. A Muang La, Jacques se fait offrir une canne à sucre de plus de 2 mètres,
Dans cette région nous traversons des villages pittoresques dont les habitants nous saluent chaleureusement. Nos arrêts sont alors l'occasion de nous observer mutuellement, chacun étant très intrigué par l'autre. Nous parcourons cette vallée dont l'eau de la rivère alimente généreusement les rizières : A Paknamnoi, nous découvrons toutes les subtilités de la cuisine laotienne. Au cours de cet arrêt à Paknamnoi, nous admirons également les splendides costumes des femmes venant vendre ces délicieux mets aux restaurants : Après deux jours et demi de cette agréable flânerie le long de la rivière, nous finissons par arriver à Muang Khoua. C'est à croire que nos mollets ne voulaient plus pousser sur les pédales pour savourer ces derniers instants de pédalage à 8. Notre voyage à vélo n'est pas terminé, mais depuis Muang Khoua nous avons choisi d'aller jusqu'à la frontière vietnamienne en bus, jugeant trop difficile et peu agréable de remonter cette piste que nous avions descendu quelques mois plus tôt. Ensuite, nous rejoindrons Tébatin, notre copain venu jusqu'à nous depuis Vesoul à vélo, au nord du Vietnam le 12 ou 13 octobre, et prendrons pour cela un autre bus depuis Dien Bien Phu. En guise d'illustration de ces réflexions pseudo-mystiques, voici les photos de la cérémonie de la "lune noire" au temple de Muang Khoua : Nous profitons de nos deux jours à Muang Khoua pour y faire notre dernière intervention, et dernière représentation des Patates Douces, dans une école laotienne.
Le chauffeur circonspect devant ce passage boueux Passage de la frontière vietnamienne à vélo, un air de déjà vu mais dans l'autre sens cette fois-ci. Descendus du bus au poste frontière, nous nous offrons ensuite 20km de descente en pleine forêt avec vue sur Dien Bien Phu. Jean-Guillaume ---------------------------------- |
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